
Le Cosco Yantian dans le canal de Panama en 2017 :une manière de montrer la très grande taille des navires qui peuvent désormais y passer -jusqu’à environ 360 m de long- depuis l’agrandissement terminé en 2016
Un article qui s’inscrit dans l’actuel programme de Géographie de Terminale et qui tente de faire un point sur un sujet important tout en faisant écho avec d’autres articles plus pointus publiés à l’été 2019 sur ce blog.
Pour Pascal Lamy qui a été directeur de l’Organisation Mondiale du Commerce de 2005 à 2013, l’invention du conteneur (1958) est un des facteurs principaux de l’essor de la mondialisation, l’autre étant la diffusion d’Internet à partir des années 1990
Différents types de marchandises à transporter sur des distances plus ou moins longues : un peu de vocabulaire pour commencer !
Les « pondéreux » sont des marchandises à fort tonnage, faible valeur ajoutée à la tonne et non périssables immédiatement
- Le transport des hydrocarbures, minerais, charbon, certains produits agricoles (céréales, tourteaux pour bétail…)
Les hydrocarbures (pétrole, gaz) : se transportent dans des « tankers » (ou pétroliers qui font jusqu’à 400 m de long) et dans des « méthaniers » (pour le gaz). Par voie terrestre on préfère le transport par « tubes » (oléoducs, gazoducs) (en anglais pipelines).
Les pondéreux solides (charbon, phosphates, minerais) non comestibles se transportent sur des minéraliers (« bulk carriers » en anglais). Sur de faibles distances on peut les diluer avec de l’eau et les transporter par tubes (c’est le cas pour certaines mines de nickel en Nouvelle-Calédonie) pour le transport des phosphates au Maroc (voir l’article le Maroc et ses phosphates).
Pour ce qui est du transport de céréales et de produits agricoles (soja, tourteaux) on a aujourd’hui des navires spécialisés qui ne transportent que ce type de produits (céréaliers) avec parfois des conditions hygrométriques et de températures particulières (bananiers) ou des conditionnement spéciaux (et non du vrac) comme pour le coton, le cacao ou le café qui sont ensachés.
Bref plus on va vers le présent et moins on a de « vraquiers » dès lors qu’il s’agit de transporter des produits en grande quantité et sur de longues distances.
Les biens manufacturés (qui ont une forte valeur ajoutée à la tonne sont aujourd’hui principalement transportés dans des conteneurs sauf les voitures qui sont plus souvent transportés dans des navires spécialisés (qui peuvent pour les plus gros transporter jusqu’à 6500 voitures !)
Les conteneurs et porte-conteneurs : la clé du transport international ?
Le conteneur est apparu en 1958 (au début on utilisait son nom anglais « container » mais le mot s’est ensuite acclimaté en français sous la graphie de « conteneur »).
Ces grosses boites en métal de couleur avec le sigle de l’armateur (ex CMA-CGM, MAERSK, MSC) ont une taille standardisée et leurs dimensions sont données en pieds (mesure anglo-saxonne) :
- longueur : 20 pieds (soit 6,096 m) pour les plus petits, 40 pieds (12,192 m) pour les grands
- largeur : 8 pieds (2,438 m)
- hauteur : 8,5 pieds (2,591 m).
Le terme EVP : signifie « équivalent vingt pieds » est l’unité de mesure utilisée dans les documents pour compter les conteneurs. Un petit conteneur est comptabilisé comme 1 EVP et un gros comme 2 EVP. (Ainsi quand il est question d’un « porte-conteneur de 16 000 EVP » cela signifie qu’on peut y mettre soit 16 000 petits conteneurs de 20 pieds, soit 8 000 grands conteneurs de 40 pieds).
Les porte-conteneurs sont apparus dans les années 1970. Leur taille n’a cessé d’augmenter. Actuellement les plus gros ont une longueur de 400 m et une capacité de plus de 21 000 EVP (voir l’article Les porte-conteneurs et la mondialisation
Pour charger et décharger ce type de navires il faut des grues immenses et un système informatisé sophistiqué pour ne pas perdre la trace des conteneurs dans un port. Les grands ports du monde sont désormais équipés de ces installations spectaculaires.
C’est vrai dans le « Northern Range » (par exemple au Havre, à Anvers, dans les avant-ports de Londres –Tilbury et Felixstowe-, à Rotterdam, Hambourg), sur les façades maritimes des États-Unis, en Asie (Dubai, Singapour, Hong-Kong,….). Plus les ports sont récents plus les installations sont modernes et monumentales (ex. port de Yangshan à Shanghai).

Terminal porte conteneurs de Felistowe (Londres) 25 grues
Les conteneurs sont particulièrement intéressants car ils peuvent être transportés sans être ouverts jusqu’à l’importateur final et transbordé sur une péniche, un train ou un camion… Tous ces modes de transports ont donc des dimensions adaptées à la taille standard des conteneurs.
Par conséquent il existe partout dans le monde des « plate-formes multimodales », c’est-à-dire des lieux de transbordement de conteneur d’un mode de transport à un autre.
A l’échelle mondiale les 3 des 4 plus grands armateurs dans ce domaine du transport maritime par conteneurs sont européens : 1er MAERSK –le Danois- 2e MSC –l’Italien avec son siège social en Suisse-, 4e CMA-CGM –le Français-. Le 3e est le chinois COSCO qui a fusionné en 2018 avec OOCL (de Hong Kong)
Différents modes de transport : un peu de vocabulaire
A l’échelle internationale le transport maritime est dominant, avec des gabarits de plus en plus impressionnants (c’est le cas des pétroliers, des porte-conteneurs… et également des navires de croisières –Oasis of the seas 360 m plus de 6 000 passagers).
Ces grands gabarits sont qualifiés d’« Overpanamax » (trop large pour passer par le canal de Panama) parfois de « Malaccamax » (trop gros pour passer le détroit de Malacca entre l’océan indien et Singapour). Cela explique que des travaux aient été réalisés pour agrandir le canal de Panama (inauguré en 2016) mais ils ne suffisent pas à permettre passage des plus gros navires.
Le transport maritime domine sur tous les flux transocéaniques pour tous types de transports : biens manufacturés, énergie (pétrole, gaz, charbon), matières premières minérales, produits agricoles
A l’échelle continentale (États-Unis, Europe, Amérique, Afrique) le transport fluvial, le transport ferroviaire et routier se partagent les flux selon les potentialités de l’endroit.
Le fret aérien concerne uniquement les produits à très haute valeur ajoutée (s’il existe un technopôle proche d’un aéroport international par exemple à Toulouse) (voir l’article sur l’exportation des roses d’Ouganda depuis l’aéroport d’Entebbe près du lac Victoria : le capitalisme africain lave-t-il plus rose ?
Le transport fluvial est le moins coûteux à la tonne-kilomètre après le transport maritime mais relativement peu de régions du monde sont favorisées dans ce domaine :
- Bassin du Mississippi, système des Grands Lacs en Amérique du Nord

Une vue du cours inférieur du Mississippi montrant la taille considérables des convois de barges poussées par rapport aux cargos
- Yangzi en Chine relié au port de Shanghai

L’escalier d’écluses du barrage des 3 gorges sur le Yangzi de près de 1 500 m de long (4 sas de 280 m et 1 sas de 350 m de long et 34 m de large) dans chaque sens. Cette échelle d’écluses à 5 niveaux permet le passage de navires de 10000 tonnes. Le dénivelé franchi est de 113 m, soit plus de 20 m à chaque sassée (la photographie est tirée d’un blog personnel avec des explications intéressantes)
- Bassin de l’Amazone

porte-conteneur Aliança sur l’Amazone (les 2 terminaux porte-conteneur de Manaus ont une capacité d’environ 500 000 EVP par an)
- Congo (sauf le débouché sur la mer car des rapides se trouvent sur le cours aval), Niger.
Mais pour le Congo ainsi que l’Amazone, situés en milieu équatorial, la population de la région reste relativement faible et le trafic est limité avec également beaucoup de transport de passagers sur de vieux rafiots.
- Bassin-versant du Rhin, affluents et canaux en Europe du nord-ouest relié au Northern Range (la façade maritime de la mer du Nord)

Le trafic sur le Rhin près de Strasbourg : navires de croisière fluvial et chalands transportant des conteneurs
Le transport ferroviaire est important là où existent de grands axes transcontinentaux : Transsibérien en Russie ; chemins de fer transcontinentaux aux USA et Canada (voir l’article sur les nouvelles routes de la soie).

Canadian Pacific Railway : un train avec des conteneurs 40 pieds sur deux niveaux traversant les Rocheuses

Carte du transport intermodal proposé par la compagnie canadienne Canadian Pacific
Le transport routier est dominant sur de plus faibles distances et dans certaines régions densément peuplées. C’est le cas notamment en Europe occidentale où ce mode de transport est dominant avec le développement des plateformes logistiques le long des autoroutes. Il est également dominant là où il n’y que peu de voies ferrées et pas de cours d’eau (ex. Afrique saharienne et sahélienne, Australie).

Un « road train » dans l’Autralie intérieure (3 à 4 remorques, plus de 100 tonnes, plus de 50 m de long)

transport du coton au Cameroun depuis le Nord du pays jusqu’au port d’exportation de Douala
Les tubes (oléoducs, gazoducs) connaissent un essor en Eurasie du fait de la localisation des gisements russes (et des pays voisins) et de leurs principaux clients (Europe, Chine). Actuellement il s’agit également de contourner les zones instables sur le plan géopolitique (ex Tchéchénie) et éviter les goulets (détroit d’Ormuz).
Un bref bilan du transport de marchandises
En valeur des marchandises transportées aujourd’hui :
- 70 % pour les biens manufacturés (car haute valeur ajoutée pour ce type de marchandise)
- 20 % pour l’énergie (tonnage considérable mais coût faible à la tonne)
- 10 % pour les produits agricoles
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