Une petite introduction à l’Afghanistan

Alors que les Talibans viennent à nouveau de s’emparer de Kaboul (15 août 2021) (ce qu’ils avaient déjà fait entre 1996 et 2001) et que l’Afghanistan revient sous les feux de l’actualité, un petit article simple de présentation notamment pour des lycéens qui n’étaient pas nés en 1979 quand l’URSS a envahi ce pays alors déjà sous les feux de l’actualité géopolitique.

L’Afghanistan un pays d’Asie centrale, montagneux, enclavé, peuplé de près de 40 millions d’habitants à 99,9 % musulmans

croquis de repérage CLG 2021

Voir aussi la vidéo de présentation sur ma chaine Youtube Repérages

Si l’on n’avait droit qu’à une seule phrase pour caractériser ce pays c’est ce que j’écrirais ! Je n’ai pas écrit que l’Afghanistan est pauvre… Je n’y crois plus tout à fait en observant ce pays depuis Google maps… C’est plus complexe : la mondialisation a vraiment changé la donne depuis 40 ans comme le montre cette photo de Jalalabad, la 5e ville d’Afghanistan, située à 150 km à l’Est de Kaboul sur la route du Pakistan (via la passe de Khyber)

La ville de Jalalabad (150 km à l’Est de Kaboul) en mars 2021 : une avenue bien entretenue, des immeubles en construction, de l’électricité, de la circulation et de l’animation : où est le pays rural, pauvre et archaïque qu’était l’Afghanistan des années 1960 (cliché Google maps)

Une région enclavée d’Asie Centrale

Villes, passages stratégiques et postes frontières, le principal est celui de Torkham vers le Pakistan dans la passe de Khyber (cartographie CLG 2021)

Premièrement nous sommes en Asie centrale c’est-à-dire dans une région du monde continentale marquée à la fois par le froid hivernal (et la neige), par l’aridité et la chaleur estivale, une région montagneuse difficile à traverser mais mettant en contact des mondes riches et qui, depuis l’Antiquité, ont entretenu des liens commerciaux à travers notamment les antiques routes de la soie. L’Hindou Kouch (qui est un massif montagneux de l’Himalaya et déborde sur le Pakistan culmine à 7 708 m au Tirich Mir) et peut se franchir en passant par le col de Salang (à 3708 m d’altitude) et aujourd’hui par le tunnel de Salang (à 3300 m d’altitude).

C’est aussi une région où les vallées irriguées (rares certes) peuvent abriter des villes historiquement prospères.

Sauf que le monde mondialisé d’aujourd’hui est un monde où les flux commerciaux les plus intéressants se sont déplacés vers la voie maritime. Ces flux commerciaux ont largement abandonné des routes traditionnelles (Sahara comme Asie centrale, ruinant par là la prospérité de ces régions. Elles sont alors devenues, à partir des années 1960 (au moment où la croissance démographique explosait) parmi les régions les plus pauvres et les moins développées de la planète.

Très clairement de telles régions peuvent pourtant être prospères si le commerce y est paisible parce que les voyageurs ne sont pas sans cesse attaqués par des brigands armés. Mais, dans la montagne, avec des cargaisons importantes on ne peut pas passer n’importe où. Certains cols (comme la passe de Khyber -voir l’article La passe de Khyber : une route frontière d’importance stratégique entre Pakistan et Afghanistan), certaines routes sont littéralement incontournables. Celui qui tient ces points stratégiques, tient tout le pays.

Mais comment tenir ces points stratégiques dans un pays où chaque ethnie, chaque tribu défend de manière aussi farouche son petit coin de terre, surtout si, en moins de 2 générations, des sommes considérables d’argent et des quantités ahurissantes d’armes se répandent dans tout le pays ce qui a été le cas en Afghanistan depuis le début des années 1980. Les Soviétiques s’y sont usés de 1980 à 1988, les Américains (et Occidentaux) aussi, de 2001 à aujourd’hui.

A quels pays peut-on comparer l’Afghanistan ?

En fait l’Afghanistan malgré le suffixe « -stan » qu’on retrouve dans son nom comme celui de plusieurs voisins (Pakistan, Tadjikistan, Ouzbékistan, Turkménistan, Kirghizistan,Kazahstan) est un pay satypique. Comme ces voisins les milieux sont souvent montagneux et désertiques mais l’Afghanistan au XIX e siècle n’a été colonisé par personne ni par les Britanniques (qui contrôlaient l’Empire des Indes), ni par les Russes (qui se sont emparés du Caucase et de l’Asie centrale ce qu’on appelait à l’époque le « Turkestan » russe).

Sur ce plan (l’absence de colonisation au XIX e siècle), l’Afghanistan partage le sort de l’Iran, son voisin de l’Ouest sauf que l’Iran se perçoit comme l’héritier de l’Empire perse de l’Antiquité, avec un État fort capable de rassembler des Iraniens qui la plupart parlent la même langue (le farsi), tandis que l’Afghanistan rassemble des tribus diverses (Tadjiks, Pachtouns, Hazaras…) qui ne parlent pas la même langue et ont beaucoup de mal à s’entendre. (voir l’article La diversité ethnolinguistique de l’Afghanistan et les Talibans)

L’Afghanistan et ses principaux voisins (données INED, Population et sociétés Tous les pays du monde 2019, tableau CLG août 2021)

Aucun pays au monde n’a le même poids démographique (près de 40 millions d’habitants à peu près autant que l’Irak), le même dynamisme démographique (4,3 d’indice de fécondité ce qui reste élevé et montre que le niveau d’éducation et d’autonomie des femmes est resté bas) et le même niveau de développement.

L’Iran le grand voisin à l’Ouest est beaucoup plus peuplé (plus de 80 millions, soit plus du double), d’une taille bien plus considérable (1 million de km² supplémentaire), beaucoup plus développé (indice de fécondité à 2,1).

L’Ouzbékistan, le Turkménistan et le Tadjikistan qui ont été des républiques soviétiques s’en sortent mieux sur le plan démographique et économique.

C’est aussi le cas du grand voisin pakistanais, puissance nucléaire de plus de 200 millions d’habitants même si les provinces du Nord-Ouest,vers Peshawar, dans ce qu’on appelle les « zones tribales » sont peu prospères (voir l’article sur Malala Yousafzai, la jeune Prix Nobel de la Paix 2014, originaire de cette vallée de la Swat qui a été blessée par des Talibans et a pu émigrer au Royaume Uni continuer ses études)

Dans cet environnement enclavé d’Asie Centrale l’Afghanistan est le pays le plus pauvre (1960 $ de RNB ppa/hab) ce qui est pourtant largement plus que certains pays musulmans enclavés d’Afrique subsaharienne (Mali 1130 $, Niger 1030 $), également déstabilisés par le terrorisme islamiste.

Comment se présente le relief et comment est répartie la population ?

Kaboul capitale de l’Afghanistan est aujourd’hui une ville de l’ordre de 4,2 millions d’habitants  

La croissance démographique à Kaboul a été fulgurante au XX e siècle : 75000 habitants vers 1900,  le double dans les années 1930, plus de 500 000 au début des années 1970. Cette croissance a été liée à la fois au dynamisme démographique de la population (jeune et à forte fécondité) et à l’afflux de populations des montagnes qui se sont réfugiées en ville pour fuir les combats entre l’armée soviétique et les « moudjahidines » à partir de 1980.

Tableau simplifié des noms de ville à connaître pour évoquer les problèmes de l’Afghanistan

Les autres villes importantes sont Kandahar, dans la plaine au Centre Sud, Herat à l’Ouest, Mazar-i-Sharif au Nord et Jalalabad à 150 km à l’Est de Kaboul sur la route du Pakistan.

L’Afghanistan reste un pays peu urbanisé (taux d’urbanisation de 26 %) ce qui est très faible à l’échelle mondiale.

Les passages stratégiques : postes frontières et tunnel de Salang

La route du col de Salang entre Kaboul et Mazar-i-Charif dans l’Hindou Kouch : le col est à 3708 m

Le tunnel de Salang à 3300 m d’altitude dans le massif de l’Hindou Kouch. Il a été ouvert en 1964 et c’est l’un des tunnels routiers les plus hauts du monde. Il a été construit par les Soviétiques pour améliorer la circulation entre Kaboul et le Nord du pays (et don l’URSS).

Le Pont de l’Amitié est le point de franchissement de la frontière Nord entre l’Afghanistan et l’Ouzbékistan. Il franchit l’Amou Daria (un de ces 2 cours d’eau endoréique avec le Syr-Daria qui se jettent dans la mer d’Aral) à proximité de la ville ouzbèke Termez (une ville d’environ 140 000 habitants). Ce pont  cantilever a été construit par l’URSS pendant la guerre d’Afghanistan (1979-1989).

Pas de conclusion pour l’instant : ce n’était qu’un repérage

Nous nous arrêterons là pour l’instant et évoquerons d’autres aspects importants dans des articles ultérieurs : sur l’histoire notamment l’histoire de l’Afghanistan au XIX e siècle, la guerre entre l’URSS et les moudjahidines entre 1980 et 1988 à la fin de la Guerre Froide, la composition ethnique et linguistique, la ville de Kaboul (A quoi ressemble Kaboul ?), sur la passe de Khyber qui est le poste-frontière le plus important.

Caricature du journal satirique britannique Punch de 1878 montrant l’émir d’Afghanistan Sher Ali Khan (1825-1879 -émir d’Afghanistan de 1863 à 1866 puis de 1868 à 1879 entre coincé entre l’ours russe et le lion britannique, tout aussi féroces l’un que l’autre, une métaphore de l’Afghanistan de ce dernier quart du XIX e siècle. Après de nombreuses péripéties, l’émir d’Afghanistan Abdur Rahman Khan (1880-1901) va être soutenu par les Britanniques après qu’il ait accepté comme frontière orientale la ligne « Durand » (qui l’ampute des régions baloutches et d’une partie des régions pachtounes et le prive de tout accès à l’océan indien) : à partir de là on a le territoire actuel de l’Afghanistan.

2 réflexions sur “Une petite introduction à l’Afghanistan

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